Emploi des jeunes : chute inquiétante des formations en alternance

Les entrées en apprentissage ont reculé de 8 % en 2013 et celles en contrat de professionnalisation de 5 %.
La diminution des aides laisse craindre une poursuite du mouvement.

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Les bilans 2013 sur l’emploi se succèdent et les mauvaises nouvelles avec. Après la confirmation, lundi, de la non-inversion du chômage, puis l’annonce, mardi, d’un net recul de l’intérim, c’est de l’alternance qu’est venu, hier, un nouveau signal inquiétant. Selon les données de la Dares (ministère du Travail), 273.000 contrats d’apprentissage, outre-mer inclus, ont été signés en 2013, contre 297.000 en 2012, soit 26.000 de moins. Ce recul de 8,1 %, marque une rupture après trois années de hausse. Même en 2009, au coeur de la crise, le total avait été supérieur. Il faut remonter à 2005 pour trouver trace d’un plus mauvais bilan annuel. Seule consolation : le second semestre a été moins mauvais que le premier : la chute n’est « que » de 4,5 %. L’autre dispositif d’alternance, les contrats de professionnalisation, ne fait guère mieux, avec 117.100 signatures, contre 125.200 en 2012 (- 5,2 %). Là aussi, c’est le plus mauvais résultat depuis 2005.

Première explication de ce coup d’arrêt : la conjoncture. « Ces contrats sont signés surtout dans les TPE et les PME. Or, après avoir fait des efforts en 2012, dans l’espoir d’une reprise, elles sont retombées dans un grand attentisme, faute de visibilité », note Jean-Michel Pottier, de la CGPME. Il y a ensuite la concurrence des emplois d’avenir. « Le gouvernement avait besoin qu’ils décollent vite. Résultat, les missions locales se sont concentrées dessus en délaissant la promotion de l’alternance », confie un dirigeant syndical.

Dernier élément explicatif : le coup de rabot annoncé cet été sur les aides à l’embauche d’apprentis, réduites depuis ce 1er janvier de 550 millions pour retomber à 2,3 milliards d’euros (- 20 %). Dans l’espoir d’éviter un coup d’arrêt immédiat, Michel Sapin avait garanti que les aides seraient maintenues toute la première année des contrats signés avant fin 2013. Mais des employeurs potentiels ont pu être refroidis par le surcoût à venir, sur les deuxième et troisième années des contrats.

Depuis cet été, la CGPME et les chambres de commerce et d’industrie alertent sur le recul de l’apprentissage qui découlera, selon elles, de ces coupes budgétaires. Mais Bercy est resté inflexible. Au risque, donc, que l’objectif de passer de 417.000 jeunes en alternance aujourd’hui à 500.000 en 2017 ne soit pas tenu.

Des aides mieux ciblées

Le ministère du Travail rétorque que les aides restent stables pour les TPE (moins de 10 salariés) et avance que la refonte aboutit pour les autres à des aides « mieux ciblées, avec plus d’effet de levier ». Elles sont recentrées sur les jeunes les moins qualifiés, qui représentent « le plus gros volume d’apprentis, mais aussi celui où la progression a été la plus lente et où de gros progrès sont réalisables », indique ainsi l’entourage de Michel Sapin.

Le gouvernement mise aussi sur la réforme de la taxe d’apprentissage. Incluse dans le collectif budgétaire de décembre, elle a été censurée, pour des raisons de forme, par le Conseil constitutionnel. La Rue de Grenelle a depuis réécrit sa copie, et la réforme devrait être intégrée au projet de loi sur la formation qui doit être adopté avant fin mars. Cette réforme flèche une plus grande part de la taxe vers les centres de formation des apprentis (CFA) en vue d’y développer des places. Mais elle ne doit entrer en vigueur qu’en janvier 2015.

Derek Perrotte

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