L’insertion professionnelle des jeunes : de fortes inégalités selon le diplôme

5 décembre 2016 – Statut, chômage, salaires : les conditions d’insertion des jeunes dans l’emploi sont très inégales suivant le niveau de diplôme.


Les jeunes générations subissent, dans leur ensemble, les conséquences d’un marché du travail morose. Mais à l’intérieur de la jeunesse, les écarts sont énormes entre les diplômés et ceux qui ne le sont pas en matière d’emploi. Une synthèse des principales données sur l’insertion des jeunes.

  • Quel statut pour le premier emploi ?

Les deux tiers des jeunes sortis du système éducatif en 2010 ont signé un contrat à durée déterminée pour leur premier emploi, selon les données du Céreq. Mais c’est le cas de 78 % des non-diplômés contre 65 % des titulaires d’une licence ou d’une première année de Master et 49 % des détenteurs d’un bac+5. Alors qu’un jeune sur cinq (des sans diplômes aux bac+2) est généralement embauché en intérim, c’est le cas de seulement 6 % des bac+5.

Pour mieux comprendre la situation, il faudrait pouvoir entrer dans les détails. Il y a précarité et précarité. Certains contrats temporaires fonctionnent comme des périodes d’essai qui servent de tremplin vers un emploi durable. D’autres, en revanche, souvent occupés par les moins diplômés, installent durablement les jeunes dans l’insécurité de l’emploi, notamment par le biais de CDD renouvelés de façon contraire au droit du travail. Dans l’industrie et le bâtiment, une partie des jeunes non qualifiés, souvent des hommes, va de mission d’intérim en mission d’intérim. De même, il faudrait pouvoir distinguer la situation des jeunes en fonction du type de filière suivie, à niveau de diplôme équivalent. Tous les BEP ne débouchent pas sur les mêmes conditions d’insertion sur le marché du travail, comme tous les bac+5.

Le statut du premier emploi
Unité : %
Contrat à durée indéterminée  Contrat à durée déterminée  Dont intérim  Dont contrats aidés  Non salariés 
Non-diplômés 15 78 19 19 7
CAP-BEP 24 72 17 14 4
Baccalauréat 24 71 17 14 5
Bac+2* 27 69 20 12 4
Bac+3/4* 31 65 11 8 4
Bac+5 46 49 6 3 5
Ecoles de commerce et d’ingénieurs 61 36 5 3 3
Doctorat 28 57 1 1 15
Ensemble 28 67 15 11 5

* hors santé social.
Source : Cereq – enquête 2013 auprès de la génération 2010 – Données 2010 – © Observatoire des inégalités

  • Trois ans après la fin des études : les écarts se creusent

Trois ans après la fin des études, les écarts se creusent en fonction des titres scolaires. Les jeunes ayant obtenu un diplôme niveau bac+5 sont 18 % en CDD, contre 61 % des non-diplômés et 44 % des titulaires d’un CAP-BEP. Un marché du travail à double vitesse se constitue entre ceux qui demeurent dans l’emploi précaire et les autres (CDI et fonction publique). Le niveau de qualification joue un rôle essentiel.

Conditions d’emploi des jeunes trois ans après la fin de leurs études
Unité : %
Contrat à durée indéterminée  Contrat à durée déterminée  Non salariés 
Non-diplômés 33 61 6
CAP-BEP 51 44 5
Baccalauréat 52 42 6
Bac+2* 66 28 6
Bac+3/4* 67 27 6
Bac+5 76 18 6
Ecoles de commerce et d’ingénieurs 89 7 4
Doctorat 49 32 20
Ensemble 59 34 7

* hors santé social.
Source : Cereq – enquête 2013 auprès de la génération 2010 – Données 2013 – © Observatoire des inégalités

  • Le milieu social trois ans après la fin des études

Un tiers des jeunes ayant achevé leurs études en 2010 appartiennent à la catégorie des professions intermédiaires en 2013, 28 % sont employés, 20 % sont cadres supérieurs et 19 % sont ouvriers. 96 % des titulaires d’un doctorat sont cadres contre 3 % de ceux qui n’ont « que » le bac en poche. 44 % des non diplômés sont ouvriers, c’est le cas de 12 % des bac + 2. Dans un pays où la formation continue est relativement peu développée, les positions sociales acquises à l’entrée dans le marché du travail sont décisives pour la suite de la carrière professionnelle.

Catégorie socioprofessionnelle des jeunes trois ans après leur sortie du système scolaire selon le diplôme
Unité : %
Agriculteurs et indépendants  Cadres supérieurs  Professions intermédiaires  Employés Ouvriers
Non-diplômés 2 1 13 40 44
CAP-BEP 3 1 10 41 45
Baccalauréat 4 3 26 43 24
Bac+2* 3 11 47 27 12
Bac+3/4* (Licence/Master 1) 2 21 52 21 4
Bac+5 – Master 2 1 69 23 6 1
Doctorat <1 96 3 1 <1
Ensemble 2 20 31 28 19

* hors santé social
Source : Céreq – enquête 2013 auprès de la génération 2010 – Données 2013 – © Observatoire des inégalités

  • Le diplôme : un atout contre le chômage

Face au chômage, les inégalités sont encore plus fortes. En 2013, un jeune sans diplôme sur deux sorti de l’école en 2010 était sans emploi, contre 10 % des bac+5 et 6 % des titulaires d’un doctorat. Même si une partie des diplômés connaissent le chômage, c’est beaucoup plus rare que pour ceux qui ne le sont pas. De plus, ces jeunes au chômage perçoivent le plus souvent des niveaux d’indemnités très réduites, quand ils sont indemnisés.

Taux de chômage des jeunes en 2013
Trois ans après la sortie de formation initiale
Unité : %
Taux de chômage 
Non-diplômés 50
CAP-BEP 32
Baccalauréat 21
Bac+2* 15
Bac+3/4* (Licence/Master 1) 13
Bac+5 – Master 2 10
Ecole de commerce 9
Ecoles d’ingénieurs 3
Doctorat 6
Ensemble 23

* hors santé social
Source : Céreq – enquête 2013 auprès de la génération 2010 – © Observatoire des inégalités

  • Les niveaux de salaire des jeunes

Les non-diplômés, les titulaires d’un CAP ou BEP ou d’un baccalauréat touchent un salaire net mensuel médian d’environ 1 100 euros lors de leur première embauche contre 1 700 euros pour les diplômés d’un bac+5.Trois ans après la sortie du système scolaire, l’échelle des salaires s’est déjà étirée : les jeunes qui n’ont pas ou peu de diplôme ont un salaire équivalent à 1 150 euros, les titulaires d’un doctorat à 2 430 euros. 1 300 euros mensuels séparent ces jeunes, avec des conséquences très concrètes en termes de conditions de vie : surface et localisation des logements, consommation, vacances, loisirs, etc. Au fil du temps, les écarts vont continuer à se creuser.

Salaire mensuel net médian des jeunes
Unité : euros
A l’embauche d’un premier emploi  Trois ans après la sortie du système scolaire 
Non-diplômés 1 070 1 065
CAP-BEP 1 110 1 225
Baccalauréat 1 090 1 275
Bac+2* 1 220 1 435
Bac+3/4* 1 300 1 540
Bac+5 1 700 2 025
Doctorat 2 030 2 430
Ensemble 1 200 1 425

* hors santé social.
Source : Céreq – enquête 2013 auprès de la génération 2010 – © Observatoire des inégalités

Le diplôme, une arme essentielle

Les jeunes connaissent bien des difficultés communes. Mais celles-ci sont très inégales selon les parcours scolaires. Face à la précarité, au chômage et aux bas salaires, le diplôme demeure toutefois un atout essentiel. Pour une partie des plus diplômés – notamment des filières généralistes de l’enseignement supérieur -, la situation n’est pas toujours facile et l’insertion souvent lente. Dans un pays où le titre scolaire est sacralisé, ceux qui ne sont pas dotés d’un diplôme connaissent une insertion beaucoup plus difficile. Une fois dans l’emploi, le faible développement de la formation professionnelle continue et des promotions internes font que, malheureusement, le « ticket d’entrée » décide encore dans de trop nombreux cas de la suite du parcours professionnel. La réussite reste possible, mais au prix d’efforts beaucoup plus importants que pour les salariés diplômés.

Source :

http://www.inegalites.fr/spip.php?page=article&id_article=1463