Quelle politique d’insertion dans les centres d’insertion socioprofessionnelle?

Avec la montée en puissance du chômage de masse, à partir de la première crise pétrolière de 1973, amplifiée par celle de 1979, l’emploi devient une denrée de plus en plus rare. Les services sociaux traditionnels vont être amenés de plus en plus souvent à se préoccuper de la (re)mise à l’emploi de leurs usagers. Une nouvelle spécialité se crée chez les travailleurs sociaux. Elle va prendre le nom « d’agent d’insertion ». Cette analyse permet de découvrir comment l’environnement économique et social de notre pays a nécessité la création d’une nouvelle spécialisation du travail social : l’aide à l’insertion professionnelle. Une seconde partie explicitera les contours de cette nouvelle profession sociale, apparue avec la pénurie d’emplois : les agents d’insertion.

1. L’insertion : une notion floue et passe-partout

Le flou de la notion d’insertion tient en partie au fait qu’elle désigne à la fois un processus et un état qui conduisent un sujet à trouver une place reconnue dans la société, son identité sociale.

  • Le processus évoque un passage, une transition d’un état à un autre. Qui ne concerne pas seulement le temps de sortie du système scolaire jusqu’à l’entrée dans la vie professionnelle. Mais aussi toutes les périodes d’aller-retour entre des périodes d’inactivité professionnelle et les périodes d’emploi : chômage de +/- longue durée, période de libération conditionnelle, reconnaissance du statut d’handicapé, malade mental léger, etc.
  • L’insertion sociale, c’est l’état final qui évoque une participation « normale » non stigmatisée à la vie de la société, tout particulièrement aux niveaux économique (production et consommation), social (habitat, santé…), culturel et de relations sociales.

Pendant les années de croissance, les « golden sixteen», jusqu’à la première crise pétrolière de 1973, la pauvreté et la précarité sont des phénomènes marginaux. On colle ce profil à des personnes handicapées, débiles, inadaptées sociales, mais non aux chômeurs. Il s’ensuit que le travail avec ces personnes était essentiellement un travail social, et psycho médico-social.

On voit apparaître un statut nouveau, celui des « minimexés », c’est à dire des personnes, chômeurs de longue durée exclus, accidentés de la vie sociale du fait de la crise (indépendants en faillite, mères abandonnées …), qui ont perdu le bénéfice de la protection sociale générale et sont envoyés vers les CPAS pour recevoir une aide sociale. Avec la loi instaurant un « minimum des moyen d’existence » (1974), les C.P.A.S. sont dorénavant légalement tenus de payer ce  « minimex », ce qui n’était pas le cas auparavant avec l’aide sociale.

Cette séparation entre deux sphères (l’emploi et la formation professionnelle, d’une part, l’action sociale, d’autre part) ne résiste pas à l’amplification du nombre des demandeurs d’emplois. Les professionnels de l’insertion (les C.P.A.S, les ASBL d’insertion professionnelle qui apparaissent dans le paysage social de nos régions dans les années 1980 …) unifient progressivement leurs pratiques autour de l’accompagnement de la personne, du « suivi individualisé » et de formations en vue d’une qualification professionnelle. C’est la multiplication des mises en stages, découvertes des milieux professionnels, etc. Ce sont les débuts de « l’enseignement à horaire réduit » dans l’enseignement technique et professionnel, suite à la prolongation de la scolarité de 14 à 18 ans (en 1983). L’insertion professionnelle s’assortit de plus en plus de formules de formation qui sont souvent plus des prises en charge psychologiques +/- déguisées, que des stages ayant un horizon professionnel. Les débuts des politiques d’insertion sont pris en charge par les services sociaux et donc par des travailleurs sociaux.

2. Des réalités de l’insertion à ne pas confondre : l’insertion professionnelle et l’insertion sociale ?

Il faut bien reconnaître qu’une orientation s’est progressivement mise en place. Pour faire court, les travailleurs sociaux, chargés de l’insertion, estiment qu’il n’est pas possible d’insérer professionnellement les personnes non qualifiées si on ne les insère pas socialement d’abord. On voit apparaître une confusion entre « formation en vue d’acquérir des compétences sociales » (se lever à l’heure, être régulier en formation, apprendre à travailler en équipe, prévenir en cas de retard ou de maladie, etc.) et insertion sociale. La philosophie de l’insertion est « pas d’insertion professionnelle, sans insertion sociale » ou « l’insertion sociale est un préalable à l’insertion professionnelle ».

Il s’agit manifestement d’une confusion entre deux notions qui sont proches mais qui représentent des réalités tout à fait différentes : l’insertion sociale et le travail sur l’acquisition de compétences sociales. Beaucoup de travailleurs sociaux, souvent de bonne foi, estiment qu’un nombre important de demandeurs d’emploi non qualifiés sont inemployables, y compris dans les entreprises d’insertion et dans les entreprises de travail adapté. Qu’il ne faut plus viser à tout prix l’insertion professionnelle pour tous, et qu’à défaut, l’essentiel est « l’insertion sociale ». D’ailleurs, il est bien connu qu’il n’y a pas d’emploi pour tout le monde. C’est la notion d’handicap social, qui n’arrange rien et qui valide l’état d’impuissance de la société à insérer les personnes les plus précaires.

Cette conception de l’insertion est un piège. L’insertion dite « sociale » se substitue ainsi progressivement à l’insertion professionnelle … parce que l’on ne parvient pas à réaliser cette dernière. Ce que nous proposons consiste justement à ne pas tomber dans ce panneau du tri des demandeurs d’emploi, de la catégorisation entre les personnes employables et celles qui ne le seraient pas (les inemployables). Cette approche est largement inspirée de notre expérience personnelle et des travaux de l’association française « TRANSFER », située à Bordeaux[1].

En Wallonie et à Bruxelles, nous devons nous poser la question de savoir si l’objectif des structures financées pour former les personnes et les rendre « employables » doit rester oui ou non une insertion professionnelle.

Aujourd’hui plus qu’hier, l’insertion sociale est une conséquence de l’insertion professionnelle et non l’inverse. Nous ne croyons pas que pour atteindre l’insertion professionnelle … il faut d’abord réaliser une insertion sociale. Bien sûr, il y a lieu de faire acquérir un minimum de compétences sociales avant d’envoyer un demandeur d’emploi en stage ou à l’emploi. Mais il ne faut pas confondre « acquisition de compétences sociales » et « insertion sociale ».

Que signifie, d’ailleurs, au juste, une insertion sociale sans une insertion professionnelle ? En quoi peut bien consister une insertion sociale s’il n’y a pas d’insertion professionnelle ?

L’insertion sociale sans insertion professionnelle n’a pas de sens dans une société comme la nôtre, profondément structurée autour des rôles économiques, et donc autour de l’identité professionnelle.

3. L’insertion sociale

Que recouvre exactement la notion d’insertion sociale ? La question est cruciale, face à des phénomènes d’exclusions durables, parfois depuis plusieurs générations et qui ont tendance à s’amplifier.

L’insertion sociale couvre l’ensemble des rapports de la personne avec son environnement social. Etre inséré, signifie avoir une place, être assuré d’un statut, d’un rôle social reconnu. Le concept d’insertion sociale tend à devenir une notion transversale qui désigne la finalité ultime d’une démarche. L’insertion sociale est, en fait, beaucoup plus large que la simple insertion professionnelle : elle vise tous les secteurs de la vie de la personne. L’emploi, bien sûr mais aussi la santé, le logement, la culture, l’éducation, la mobilité… L’objectif est de replacer la personne en difficulté au coeur de la société. Le travail en vue de l’insertion sociale va donc s’attacher à restaurer et restructurer l’identité de la personne, de recomposer son réseau de relations et donc lui permettre d’acquérir un nouvel ancrage dans le tissu social. C’est un échange et un lien entre la personne et la société.

Dès lors, le travail d’insertion sociale pourrait se définir comme celui qui s’adresse à toute personne majeure qui se trouve en situation d’exclusion c’est-à-dire qui est confrontée ou susceptible d’être confrontée à la difficulté de mener une vie conforme à la dignité humaine et d’exercer les droits reconnus par l’article 23 de notre Constitution[2].

Comment qualifier la situation de personnes, sans emploi, désocialisées depuis plusieurs années ou connaissant des problèmes lourds (assuétudes, endettement, rupture des liens familiaux, déstructuration …) ? Un service d’insertion socio professionnelle doit-il mettre la priorité sur des personnes susceptibles de se réinsérer professionnellement et laisser au bord de la route celles qui, de toute évidence, ne pourront pas (ou plus) prétendre à re-trouver un emploi ?

Manifestement, dans les divers dispositifs sociaux en vigueur en Wallonie et à Bruxelles, ce sont les services sociaux de première ligne des C.P.A.S. ceux-là même qui paient le « revenu d’intégration sociale – , d’une part et les associations reconnues comme « services d’insertion sociale » d’autre part, qui sont compétentes pour prendre en charge la situation des personnes les plus éloignées du marché de l’emploi. Il s’agit de services « d’assistance sociale », dont les travailleurs sociaux reconnaissent que les bénéficiaires ne sont pas en mesure de bénéficier d’un dispositif d’insertion socioprofessionnelle.

Quel type de travail social pratiquent-ils ? Quelles sont leurs priorités ? Elles sont de cinq ordres :

  • Permettre l’accueil et l’écoute : être accessible et proches des personnes dans le besoin ; l’entretien d’aide de face à face (individuel) est un outil privilégié des assistants sociaux;
  • Permettre la prise en charge d’un public qui rencontre des problèmes très diversifiés : santé mentale, pauvreté, endettement, dépression … ;
  • Permettre aux personnes aidées de se recréer un « projet de vie », notamment par le biais de rencontres et d’échanges, par le rétablissement de liens sociaux et familiaux ;
  • Renouer des liens sociaux. Soutenir une personne signifie aussi, très souvent, travailler avec son entourage, en particulier familial ;
  • Tendre à l’insertion durable par la responsabilisation du bénéficiaire. L’objectif est que la personne recouvre l’estime de soi, qu’elle ait à nouveau des relations sociales suffisantes (volontaire dans une association, participant dans une chorale, un groupe sportif, un comité de quartier, une association de parents, un comité de locataires, un groupe d’aînés …)

L’ensemble de ces impératifs s’inscrit sur le long terme. C’est un processus lent, qu’il est difficile d’objectiver et de quantifier. Pour ce type de personne, l’insertion professionnelle n’est pas un but en soi. Cet objectif met tout le monde en échec : les services et travailleurs sociaux ainsi que les personnes elles-mêmes.

Aujourd’hui, nous constatons que le travail d’insertion professionnelle de beaucoup de structures s’éloigne de l’objectif explicite initial d’accès à l’emploi pour développer, à défaut et en attendant, des activités d’insertion sociale. Dans certains centres de formation on ne dispose pas d’un réseau d’employeurs pour mettre les demandeurs d’emploi en stage de formation ou à l’emploi. Le monde de l’entreprise reste étranger à beaucoup de travailleurs sociaux.

4. Distinction entre le « marché de l’emploi » et le « marché du conseil aux chômeurs »

Avant d’aborder le type de pratique professionnelle qu’il y a lieu de mettre en place dans un service d’insertion professionnelle, il nous faut préalablement faire la distinction entre deux notions : celle du « marché de l’emploi » et celle du « marché du conseil aux chômeurs ».

Le marché de l’emploi, c’est le lieu où s’organise la rencontre entre l’offre et la demande d’emploi, selon certaines méthodes et certaines modalités. On n’engage pas une aide ménagère de la même manière qu’un manoeuvre du bâtiment ni qu’un enseignant, ni qu’un travailleur social. Il faut bien comprendre que le marché de l’emploi est une construction sociale et non une réalité naturelle. La qualité de l’offre et sa quantité sont sensibles à son mode de fonctionnement et à la structure même de l’activité économique.

Exemple : pourquoi des milliers de petits indépendants, qui croulent sous les commandes, qui ont des prix compétitifs pour leurs clients, qui mettent un temps fou pour venir travailler chez leurs clients, n’engagent-ils pas un premier travailleur salarié pour les aider ? Notamment, dans les divers métiers du bâtiment et ils sont nombreux. Pourquoi un nombre important d’entre eux, ayant engagés des salariés dans le passé, les ont-ils licenciés et ont décidés de travailler seuls dorénavant ?

Il faut appréhender qu’il existe sur ce « marché de l’emploi » des niches importantes d’emplois disponibles et qu’il y a des intermédiaires qui sont en position particulière : le recruteur d’une entreprise ne joue pas le même rôle que l’agent du Forem, d’Actiris ou de l’Onem ni que celui de la Mission Régionale ou d’une entreprise d’insertion.

Tous ces intermédiaires participent à la construction sociale de ce marché de l’emploi. Les demandeurs d’emploi qualifiés – disons à partir du niveau d’un baccalauréat – n’ont pratiquement pas recours à ces intermédiaires. Le public des demandeurs d’emploi peu qualifiés en est le plus dépendant.

Par ailleurs, pour ce dernier type de public, il y a une multitude d’aides à l’emploi disponibles que, la plupart du temps, les petits employeurs ne connaissent pas. C’est un rôle important des « agents d’insertion » que de leur faire connaître. Et donc, non seulement de maîtriser parfaitement ces multiples aides à l’emploi mais aussi de connaître les employeurs susceptibles d’être intéressés par ces aides à l’emploi.

L’autre notion à distinguer est celle du « marché du conseil aux chômeurs ». Ce « marché » est constitué des pratiques de formation professionnelle, des pratiques d’orientation, d’aide et de suivi des demandeurs d’emploi. Il suffit de parcourir nos diverses institutions sociales pour retrouver les nombreux endroits où travaillent aujourd’hui des « agents d’insertion », même si leur fonction ne se dénomme pas exactement de cette manière : Onem, Forem, Actiris, Missions locales et régionales, CPAS, EFT, AFT, OISP, entreprise d’insertion, entreprise de travail adapté, Centre d’Education et de Formation en Alternance, enseignement professionnel, agences d’intérim, le Carrefours Emploi Formation Orientation, etc.

Les pratiques en vigueur sur ce « marché du conseil aux chômeurs » concernent aussi bien :

  • Des savoirs et des contenus techniques ;
  • Des savoirs faire par le biais du « travail sur soi » ;
  • Des aides à la recherche d’emploi (CV, entretien d’embauche …)

Ce marché hérite des pratiques classiques du travail social autour de l’aide à la personne symbolisé par l’entretien d’aide individuel (= case work, la première pratique professionnelle de l’assistant social).

Au sein de ce marché, l’agent d’insertion adopte spontanément une posture de thérapeute confronté à des « problématiques individuelles ». Il commence d’ailleurs sa relation avec le demandeur d’aide par réaliser une « anamnèse », une pratique professionnelle purement médicale ou psychologique.

Comme ces travailleurs sociaux observent qu’il est de plus en plus difficile pour ces personnes de se réinsérer professionnellement, ils finissent par admettre qu’il y a une sorte de « stock » de personnes « inemployables », exclues à jamais de l’emploi, même en cas de reprise économique.

Les offres d’emploi exigeraient des qualifications et des compétences que ces demandeurs d’emploi ne posséderaient pas. Ils déclarent qu’il y a des « pièges à l’emploi » dans lesquels les individus les moins qualifiés ont plus intérêt à rester au chômage qu’à accepter des emplois précaires, épuisants et mal payés.

Ces travailleurs sociaux pensent que les demandeurs d’emploi auxquels ils ont affaire souffrent d’un déficit de motivation et de mobilisation. Que leurs difficultés sont de l’ordre de leur personnalité et que c’est là qu’il faut agir afin de les préparer à l’emploi. Il s’agit d’un type de pratique professionnelle quasiment thérapeutique.

Les pronostics négatifs faits sur les individus génèrent des conséquences réellement négatives. Si je pense qu’un individu n’est pas en mesure d’accéder à l’emploi, qu’il est trop âgé, trop peu qualifié, trop peu motivé, il a d’autant moins de chance de réussir quand se met en place le dispositif censé l’aider. Cette pratique, héritée du travail social traditionnel, est non seulement inefficace mais véritablement perverse puisqu’elle enferme les individus dans les défaillances personnelles qu’on leur attribue. Les individus, au fond, sont responsables de ce qui leur arrive. Ce type de relation professionnelle préconise qu’il faut agir sur les représentations et les dispositions des individus afin de changer leurs pratiques. Quand une personne ne parvient pas à trouver d’emploi, il faut d’abord changer la personne, la former, lui faire prendre conscience de ses lacunes. Le problème de leur non emploi devient leur problème, lié à leur personnalité. Cette psychologisation des pratiques d’insertion est contre efficace. Elle enfonce les individus plus qu’elle ne les aide, en les stigmatisant.

Nous pensons que c’est tout le contraire qu’il faut pratiquer. Ce n’est pas en changeant les idées que l’on change les pratiques. C’est en transformant les pratiques que l’on change les idées.

En réduisant le chômeur à ses problèmes, on finit par lui faire croire qu’il en est la cause. Par le croire soi – même et par le lui faire croire en voulant le transformer.

Ce sont les actes qui transforment les individus, éventuellement leurs idées, plus que le contraire. C’est la situation de travail qui crée les qualités du travailleur bien plus que l’inverse. Sinon la pédagogie de « formation par le travail » n’aurait plus aucun sens. Pour former un travailleur adulte, il faut d’abord qu’il ait du travail.

La croyance de beaucoup de professionnels de l’insertion qui évoluent sur le « marché de l’aide aux chômeurs » dans les vertus magiques du « projet » participe du même mécanisme d’attribution de l’échec des individus à des causes personnelles. Nous ne croyons pas que le projet anticipe rationnellement une action. Nous pensons qu’il n’y a pas lieu de faire croire à des demandeurs d’emploi qu’ils disposent des ressources suffisantes que pour mettre au point un projet cohérent et opérationnel. Cela ne fait que les confronter à leur propre dénuement et les renvoyer à leurs carences ?

Mettre des demandeurs d’emploi sur la voie de l’insertion professionnelle, c’est les mettre dans les conditions d’un travail sans attendre qu’ils soient transformés et soient portés par un projet.

Si le marché du travail est une construction sociale, la relation d’emploi est d’abord une relation sociale. Il importe d’abord de reconstruire cette relation sociale, de travailler avec les employeurs autant qu’avec les demandeurs d’emploi. Il faut agir de façon pro-active, mettre les individus face à leurs employeurs potentiels, organiser des rencontres avec les employeurs dans le cadre des formations sociales, faire témoigner des anciens qui ont retrouvé un emploi, mettre en stage en entreprise, organiser des périodes d’essai, permettre à chacun de faire ses preuves dans des situations réelles.

Une analogie permet de mieux saisir l’aspect paradoxal de cette pratique professionnelle. Un usager dont l’alimentation électrique est en panne serait fort surpris d’entendre qu’on viendra le dépanner à condition qu’il essaie d’abord de réparer lui-même (version « non directive ») ou encore qu’on viendra seulement pour l’aider à se dépanner (version « accompagnement »). Le paradoxe provient du fait qu’on est renvoyé à ses propres ressources qu’on estime insuffisantes, alors qu’on croyait s’adresser « à qui de droit » qui aurait les ressources adéquates.

Dans une seconde partie, nous tenterons de définir quel est exactement le rôle attendu de ses « agents d’insertion », acteurs du « marché de l’emploi » plutôt que celui du « conseil aux chômeurs ».

Pierre Moreau*, Le GRAIN asbl, 28 mai 2013

Notes

* Assistant social, licencié en politique économique et sociale, maître assistant (e.r.) au département social de la Haute Ecole Louvain en Hainaut (Mons), auteur du livre « Mieux comprendre l’exclusion sociale, Editions L’Harmattan, Paris (2000), administrateur délégué de l’ASBL CHANTIER,  entreprise de formation par le travail à Charleroi.

[1] Transfer a mis au point une méthode de travail d’insertion qu’elle dénomme « insertion par l’offre et la demande » – I.O.D. – qu’elle a expérimenté depuis plus de 25 ans et qui génère des résultats remarquables en ce qui concerne l’insertion professionnelle des publics précaires (R.M.I. et R.S.A. en France). Le lecteur intéressé peut en savoir plus en consultant le site web de cette association (www.transfer-iod.org) ou en lisant le livre de son président, M. Denis Castra « L’insertion professionnelle des publics précaires » paru aux éditions Presses Universitaires de France en 2003. Le slogan, ou, plutôt, la posture méthodologique sans doute un peu provocatrice de Transfer est : « Personne n’est inemployable ».

[2] Chacun a le droit de mener une vie conforme à la dignité humaine. Ces droits comprennent notamment :

1° le droit au travail et au libre choix d’une activité professionnelle dans le cadre d’une politique générale de l’emploi, visant entre autres à assurer un niveau d’emploi aussi stable et élevé que possible, le droit à des conditions de travail et à une rémunération équitables, ainsi que le droit d’information, de consultation et de négociation collective;

2° le droit à la sécurité sociale, à la protection de la santé et à l’aide sociale, médicale et juridique;

3° le droit à un logement décent;

4° le droit à la protection d’un environnement sain;

5° le droit à l’épanouissement culturel et social)

 

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